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Une initiative deBruxelles Environnement

Lombric commun Lumbricus terrestris

Découvrez ce discret ingénieur de nos écosystèmes.

Caractéristiques principales

Nom latin Lumbricus terrestris
Famille Lumbricidae
Sous groupe Vers
Paysage Ville Campagne • Ville Forêt • Ville Dense
Statut de protection Non protégé
Espèce non protégée.
Statut de conservation Indéterminé
Origine Indigène
Taille 10 à 30 cm
Rareté, abondance Commune
Poids 1 à 8 g
Longévité 3-4 ans

Observez, identifiez, découvrez

Les vers de terre ont derrière eux une longue histoire évolutive : ils sont apparus il y a entre 600 et 700 millions d’années ! Au fil du temps, ces espèces se sont spécialisées et diversifiées, si bien qu’il en existe à ce jour plus de 7000 espèces, dont une centaine en Belgique. Selon les sols, 4 à 15 espèces peuvent cohabiter ! Le nombre de vers varie selon la nature et la richesse du sol (10 individus/m² dans les forêts de sapins, 30/m² dans des prairies maigres, jusqu’à 500 /m² dans les pâtures).

Le lombric commun, ou simplement appelé ver de terre commun, est un ver assez grand et cylindrique, gris rosé (parfois livide), qui peut mesurer jusqu’à 20 voire 30 cm de longueur, et jusqu’à 1 cm de largeur. Il est composé d’environ 150 segments (anneaux) dotés de 4 soies (poils) peu visibles, qui facilitent ses déplacements dans le sol.

Un rôle majeur dans nos écosystèmes

Ces vermicelles sont les précieuses et fertiles déjections des vers de terre. © Muhammad Mahdi Karim, Wikimedia Commons

Détritivore, il se nourrit de déchets organiques en décomposition : débris végétaux essentiellement, mais aussi issus de champignons ou d'animaux (insectes morts ou excréments).

C’est un ver essentiellement "anécique", c’est-à-dire qu’il construit de grandes galeries verticales (de bas en haut) de 60 cm à 1m de profondeur, jusqu’à parfois 2 mètres dans les sols profonds. La nuit, il sort en surface pour récolter des matières organiques dans les couches superficielles du sol et dans la litière (feuilles mortes). Cette matière organique est ramenée dans les couches minérales des profondeurs du terrier. C’est donc un laboureur naturel, respectueux des sols (contrairement au labour agricole). Il est plus rarement "épigé", c'est à dire opérant des déplacements horizontaux en surface du sol ; ce comportement est généralement lié à des conditions climatiques spécifiques et l'inondation de ses galeries.

Sa présence en abondance modifie les communautés bactériennes et fongiques à proximité des terriers, ce qui impacte la distribution spatiale de nombreux autres minuscules invertébrés du sol. Il a également un effet bénéfique sur les plantes, dont il favoriserait indirectement le développement et la biomasse racinaires. Il augmente donc la productivité des prairies ou des grandes cultures lorsque les pratiques agricoles lui sont favorables (agroécologie).

Sa flore intestinale est précieuse pour la dégradation de la matière organique, produisant des enzymes qui digèrent la lignine et la cellulose. Dans l’intestin, des glandes secrètent une substance qui permet à la matière minérale du sol qu’il creuse et à la matière organique d'être intimement associées en un précieux élément : le complexe argilo-humique, à la base de la fertilité des sols. On retrouve ce complexe dans ses excréments, laissés à la sortie des terriers (turricules), ce qui représente entre 40 et 600 tonnes par an et par hectare.

Par son comportement et sa simple présence, le lombric participe donc à enrichir les sols en profondeur et garantir leur fertilité, mais aussi à les aérer par ses galeries et préserver leur infiltrabilité, ce qui évite à la fois leur engorgement et la stagnation de l’eau en surface. Il crée ainsi de véritables micro-habitats, favorise la croissance des plantes et constitue une ressource alimentaire à la base de nombreuses chaînes alimentaires. Les galeries servent aussi d’abri et de refuge pour de nombreux invertébrés du sol. C’est donc une espèce ingénieur et une espèce clé de voûte de nos écosystèmes.


Le saviez-vous ?

Sans poumons, le lombric respire par la peau, grâce à un mucus qui lui permet de capter l’oxygène dissous dans l’humidité du sol. Il est donc extrêmement dépendant d’une météo douce et humide. Son activité est limitée lors des nuits chaudes et lors des périodes sèches, qui sont de plus en plus intenses avec les changements climatiques. Il se réfugie alors au frais, au plus profond de son terrier. Les hivers froids et gelées intenses sont également un facteur limitant. 

À l'inverse, il ne peut plus respirer lorsqu'il y a trop d'eau et risque donc de se noyer. Il fuit alors son terrier et remonte en surface lors des grosses averses, sous l'effet d'arrosages automatiques ou de simples vibrations qu'il confond avec la pluie. Ceci l'expose aux prédateurs, voire aux dangereux rayons du soleil contre lesquels il ne dispose d'aucune protection.


Cycle biologique

Aveugle, sourd et muet, le lombric est un mets de choix pour de nombreuses espèces (oiseaux, petits mammifères, amphibiens…), malgré sa durée de vie étonnante : 3 à 4 ans, jusqu’à 6 ans en captivité. La plupart se font toutefois manger bien avant.

Les jeunes vers de terre atteignent tardivement leur maturité sexuelle, en cours de 2ème année de vie. Elle est visible par le développement du clitellum, un renflement visible sur une partie limitée du corps, où sont produits les cocons. Chez le lombric, le clitellum est situé sur les segments 33 à 37, dans la partie "haute" du corps ; les organes sexuels sont plus haut, entre le clitellum et la tête.

Les lombrics sont hermaphrodites, à la fois mâles et femelles, mais ils ne peuvent pas se reproduire seuls. L’accouplement a lieu a la surface du sol, de nuit, chacun restant accroché à son "terrier". Dans la culbute, il est possible qu’un ver soit entièrement délogé de son terrier : un risque important d’exposition aux prédateurs ! Pour cette raison, le choix du partenaire est généralement lié à la proximité, mais aussi à sa taille qui ne doit pas être trop différente.

Les ébats sont rares, avec quelques accouplements par an, au printemps et en automne lors de soirées douces et humides. Après l’accouplement, le sperme est stocké et peut servir à la production d’œufs pendant plusieurs mois (au-delà de 3 mois, les chances d'éclosion diminuent toutefois drastiquement). Chaque cocon contient en général un seul œuf, au rythme d'un cocon à la fois, jusqu'à une trentaine par an. Le cocon est déposé près de la sortie du terrier parental. Après quelques semaines, le jeune émerge et explore son environnement proche. Les jeunes ressemblent aux adultes, mais sont beaucoup plus petits et plus clairs.

  • Visibilité : toute l'année hors périodes très froides et très sèches.
  • Reproduction : au printemps et en automne lors de soirées douces et humides.
Ne les coupez pas !

Contrairement à une croyance populaire, couper un ver de terre en deux (ou plus !) ne crée pas deux vers, mais le tue comme la majorité des autres animaux. Si les parties coupées gesticulent encore, c'est simplement par réflexe lors d'une lente agonie. Dans de rares cas, si la coupure est nette et suffisamment éloignée des zones les plus vitales (bien au-delà du clitellum), la partie contenant la tête et les organes reproducteurs peut cicatriser. Dans le doute, ne les coupez pas et placez-les délicatement sous une motte de terre !

Visibilité : Janvier -
Reproduction : Avril - Juin
Reproduction : Septembre - Novembre

Risques de confusion

Ver du fumier

Le ver du fumier, Eisenia foetida, est plus petit et plus rougeaud, avec des anneaux clairs bien marqués. Il vit généralement en plus grands groupes dans la litière forestière et les tas de matière en décomposition, en particulier le compost où ses populations sont abondantes. C'est l'espèce utilisée dans les vermicompostières.

Lombric des marais

Le lombric des marais, Lumbricus rubellus, est un lombric d'un rouge vineux, très semblable au lombric commun, mais plus spécifiquement associé à des sols (très) acides (pH entre 3 et 7.7). À Bruxelles, ses observations sont très rares et une seule observation est confirmée (au Marais de Jette).

Des espèces peu observées

D'autres espèces de lombrics sont quelques fois observées en région bruxelloise, comme le lombric rose (Aporrectodea rosea), le lombric bleu (Octolasion cyaneum), le lombric blanc (Octolasion lacteum), le lombric sombre (Aporrectodea caliginosa), le lombric à tête noire (Aporrectodea longa), le lombric châtain (Lumbricus castaneus)... Sur observations.be, les observations confirmées se comptent sur les doigts de la main, mais il est probable qu'elles soient sous-représentées, tout comme le lombric commun qui, malgré son nom, n'a été encodé par les naturalistes bruxellois que moins de 20 fois en 10 ans !

Outre que ces espèces n'attirent peut-être pas les faveurs de la communauté naturaliste, beaucoup d'entre elles se ressemblent particulièrement, si bien qu'il est parfois difficile de les identifier sur la base de photos et de confirmer les quelques observations rapportées.

Place dans l’écosystème

Alimentation Décomposeur
Spécialisation alimentation Spécialiste
Essentiellement herbivore, le lombric préfère les feuilles mortes. Il consomme aussi des matières animales en décomposition (déjections, animaux morts...).
Lieu de reproduction Galerie • Au sol
Le lombric vit dans des terriers composés de galeries souterraines essentiellement verticales. Les oeufs sont déposés à la sortie du terrier.
Biotope Le lombric se retrouve dans la majorité des sols naturels et reconstitués (à l'exception des réaménagement trop récents), pour autant qu'ils soient suffisamment riches et régulièrement approvisionnés en matière organique.
Risques de confusion Nombreux vers de terre apparentés : ver du fumier, lombric des marais, lombric rosé...

Gérez et accueillez

Les lombrics, comme les autres espèces de vers de terre, paient un lourd tribut face à l’imperméabilisation des sols et l’urbanisation, qui les prive de leur habitat. Mais ils sont également particulièrement impactés par l’ensemble de nos pratiques agricoles conventionnelles et de jardinage ou d’entretien d’espaces verts. Une terre laissée nue ou labourée, un export systématique des "déchets verts", le soufflage des feuilles mortes et leur mise au rebus, la tonte excessive des pelouses et pire encore l’usage de pesticides et d’engrais chimiques, contribuent à appauvrir, assécher et stériliser nos sols.

Le lombric aime les matières organiques riches en calcium et en azote. Les feuilles mortes préférées semblent notamment être des feuilles de frêne, de tilleul et de peuplier, suivies des érables. Les feuilles de chêne, pauvres en calcium, sont généralement boudée et mangées en dernier recours.

Les épandages de fumier bovin sur les prairies sont réputés booster l’abondance et la fertilité des lombrics, jusqu’à 1000 individus/m2.

Pour favoriser cette espèce

  • Conservez au maximum les tapis de feuilles mortes dans les massifs et parterres, au pied des haies, etc.
  • Maintenez des débris et matières organiques à la surface du sol du potager (compostage en place).
  • Pratiquez le mulching sur les zones de pelouses.
  • Evitez l’arrosage des pelouses en période chaude et sèche.
  • Évitez le labour et le travail profond du sol.
  • Placez tout ver de terre dans un endroit sombre et humide (sous une motte de terre, dans les feuilles mortes...) pour éviter de l'exposer à la lumière.
  • Évitez la compaction des sols.
  • Proscrivez les pesticides et les engrais chimiques.
© Rob Hille, Wikimedia Commons
Ami des jardiniers

Certaines personnes pensent encore que les vers de terre sont des "organismes nuisibles" qui grignoteraient les racines des plantes et des légumes. C'est bien sûr l'inverse : les vers de terre améliorent la productivité des sols et augmentent les rendements ! Ils ne consomment que des matières en décomposition, et ne cassent donc pas la croute sur nos carottes.

Les vers plats exotiques : une menace de plus !

Des vers plats (plathelminthes) exotiques sont apparus depuis quelques dizaines d’années en Europe et plus récemment dans nos régions. Ces vers voyagent notamment via le transport de terres et de substrats (terreau, pots de fleurs…). Ils s’attaquent aux vers de terre et compromettent ainsi la stabilité de nos écosystèmes.

Obama nungara

Obama nungara est un ver plat de 5 à 10 cm de long, originaire d’Amérique du Sud. Sa couleur varie du brun clair au brun foncé presque noir ; il peut passer pour une limace mais est plus plat. Consommateur de nos vers de terre, il a déjà été observé à plusieurs reprises en région bruxelloise, notamment à Ixelles et Watermael-Boitsfort. 

Nocturne, il se cache en journée sous les pots, sous les sacs de terreaux, sous du bois mort… En France, il n’est pas rare de le retrouver en grand nombre et les observer chasser activement les vers de terre indigènes. Il n’ a pas de prédateur connu chez nous, même les poules le délaissent ! En cas d’observation, photographiez-le puis écrasez-le ou coupez-le.

Arthurdendyus triangulatus

Arthurdendyus triangulatus, originaire de Nouvelle Zélande, a été introduit au début des années 60, observé pour la première fois à Belfast en 63. Ses teintes varient du brun rosé au brun jaune, avec les "flancs" plus clairs. L'espèce est reprise sur la liste des espèces exotiques envahissantes préoccupantes pour l’Union Européenne. Elle n’a pas encore été observée en Belgique mais bien dans ses pays limitrophes. Toute observation doit être rapidement signalée via Observations.be.

© S. Shepherd, Schizoform on flickr