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Une initiative deBruxelles Environnement

Lucane cerf-volant Lucanus cervus

Découvrez le plus grand coléoptère d'Europe, bien présent à Bruxelles, et apprenez à le préserver.

Caractéristiques principales

Nom latin Lucanus cervus
Famille Lucanidae
Sous groupe Coléoptères
Paysage Ville Forêt
Statut de protection Espèce intégralement protégée • Espèce d'intérêt régional • Espèce Natura 2000
Protection stricte sur tout le territoire régional (Annexe II.2.1, Ord. Nature), Espèce Natura 2000 (Annexe II.1.1, Ord. Nature), Espèce d'intérêt régional (Annexe II.4.A, Ord. Nature)
Origine Indigène
Taille 10 (mannetjes) - 8 (vrouwtjes) cm cm
Rareté, abondance Rare
Longévité 2 mois (adultes) / 3 à 5 ans (larves)

Observez, identifiez, découvrez

Ce coléoptère est le plus grand insecte d’Europe. Jugez plutôt… 

Les mâles peuvent atteindre 8 cm de long. Ils sont reconnaissables aux pinces qu’ils arborent au sommet de la tête et qui font penser à des bois de cerf miniature, d’où l’appellation néerlandaise « vliegend hert ». Ces pinces leur servent pendant la période de reproduction, lorsque les rivaux entrent en conflit. 

Les femelles, d’apparence plus discrète, ne possèdent pas cette « ramure » ; elles peuvent être entièrement noires et atteindre jusqu’à 5 cm de long.

La larve, blanchâtre avec une grosse tête brun-orange, des mandibules foncées et des pattes orangées, est une version "XL" de la larve de hanneton commun. Elle est d'ailleurs dite "mélolonthoïde" en référence au nom latin du hanneton, Melolontha melolontha. 

Au pourtour de la Forêt

Le lucane cerf-volant étant rare et peu mobile, ses populations bruxelloises sont localisées, essentiellement autour de la Forêt de Soignes. Il vit à proximité directe de la souche d’arbre où il est né. Les lucanes sont casaniers, surtout les femelles qui pondent à l’endroit où elles sont nées ou à quelques dizaines de mètres seulement.

Du fait de son poids, le lucane vole assez mal, et a donc du mal à (re)coloniser de nouveaux sites. Il y a de grandes différences de comportement de vol entre les mâles et les femelles. Elles sont capables de se déplacer d’un kilomètre au maximum, mais ne parcourent souvent que quelques centaines de mètres, de leur démarche maladroite, tandis qu’on sait les mâles capables de parcourir jusqu’à plusieurs kilomètres. Leurs déplacements évitent autant que possible la traversée de zones ouvertes.

Le saviez-vous ?

Si les larves passent de 3 à 5 ans sous terre, les mâles adultes ne vivent que quelques semaines à l’air libre, et les femelles jusqu’à environ 2 mois. 


Cycle biologique

Les lucanes cerf-volant volent en début de soirée en juin-juillet (août), surtout les soirées (plus) chaudes (>16 °C). Les mâles commencent généralement à être actifs quelques heures déjà avant le crépuscule.

Avec leurs mandibules surdimensionnées, les mâles défendent les meilleurs sites d’accouplement (de vieux arbres malades avec épanchement de sève). En l’absence de tels arbres à sève (p.ex. dans les quartiers résidentiels), ils peuvent utiliser d’autres sites de rencontre tels que des poteaux d’éclairage en bois, ou alors partir activement à la recherche des femelles qui émergent et se déplacent lentement. Ces dernières produisent des phéromones qui attirent les mâles. 

L’accouplement a lieu alors simplement sur le sol. Après l’accouplement, la femelle pond dans des galeries qu’elle creuse contre du bois vermoulu ou les racines de vieux arbres.

Les larves vivent généralement 3 ans, et parfois jusqu’à 5 ans, pouvant atteindre alors une longueur de 10 cm. Leur tête est pourvue de solides mandibules pour broyer le bois. Les larves se nymphosent dans une loge de terre grosse comme le poing, dans laquelle elles passent l’hiver pour émerger au printemps suivant.

Deux lucanes mâles s'affrontent sur une branche
© Bugman95, Wikimedia Commons
  • Visibilité : de juin à juillet/août (adultes)
  • Reproduction : de juin à juillet/août
  • Stade larvaire : de juillet/août à juin (3 à 5 ans plus tard !)
Visibilité : Juin - Mi-Juillet
Reproduction : Juin - Mi-Juillet
Larves : Janvier - Juin
Larves : Mi-Juillet -
Larves (3 à 5 ans !) : Janvier -

Risques de confusion

Petite biche

Scarabée rhinocéros européen

Place dans l’écosystème

Alimentation Décomposeur
Spécialisation alimentation Spécialiste
Les adultes peuvent se nourrir de diverses substances sucrées, avec une nette préférence pour les épanchements de sève des blessures de vieux arbres, mais ils apprécient beaucoup aussi le jus de cerises éclatées ou d’autres fruits. Se nourrir ne leur est cependant pas indispensable. Les larves se nourrissent de bois humide vermoulu, enterré totalement ou au moins à moitié dans le sol, qui doit être attaqué par la pourriture blanche pour que la lignine soit décomposée et que les larves puissent accéder à la cellulose.
Lieu de reproduction Bois mort
Dans le bois mort en contact avec le sol, de préférence des souches, racines ou chicots fortement décomposés par les champignons.
Biotope Bois mort et vieux • Lisière • Massif boisé • Verger
Le lucane cerf-volant est une espèce thermophile qui a besoin d’un habitat semi-ouvert et d’un microclimat chaud. La plupart des observations ont lieu sur des pentes exposées au sud.
Risques de confusion Petite biche (Dorcus parallelipipedus) et scarabée rhinocéros européen (Oryctes nasicornis)

Gérez et accueillez

Le lucane cerf-volant est par nature un habitant de zones bien boisées, que l’on observe surtout sur les lisières et clairières forestières, sur de larges talus boisés à végétation bien étagée, ou dans des milieux à structure comparable tels que des chemins creux, de vieux vergers de hautes tiges dépérissants, bandes boisées, alignements d’arbres…

Pour pondre, le lucane cerf-volant dépend de la présence de souches attaquées par des champignons. Il s’agit habituellement d’essences à bois dur (ou, dans une moindre mesure d’essences à bois tendre) : chêne de préférence, mais aussi hêtre, tilleul, charme, châtaignier, arbres fruitiers ou autres. Les vieilles souches de taillis conviennent également. Il est important surtout que le bois soit directement en contact avec le sol.

Pour favoriser cette espèce :

  • Construisez une pyramide à lucane cerf-volant.
  • Préservez les arbres à sève et arbres de rencontre où des lucanes peuvent s'observer en été.
  • Aménagez un verger traditionnel ou plantez un arbre fruitier.
  • Laissez sur place les arbres morts et dépérissants.
  • Améliorez la pénétration de la lumière sur les site de ponte (réduisez l'ombrage et le développement d'une végétation trop volontaire).
  • Proscrivez les pesticides.
  • N'utilisez pas de feuilles de polyéthylène pour contrôler les “mauvaises herbes” ; les insectes peuvent s’y retrouver piégés.
  • Évitez de laisser des réservoirs d’eau non couverts à proximité (les insectes peuvent s’y noyer).
Reconnectez les populations

Avec sa faible capacité de dispersion, il est important de veiller à faciliter les déplacements des insectes dans toute sa zone d'habitat :

  • Créez des sites de reproduction (pyramides) tous les 100 mètres.
  • Veillez à la présence d'arbres de rencontre tous les ~ 200 mètres.
  • Connectez les sites habités par des bandes boisées et continuités arborées.

Les observations de l’espèce à Bruxelles et en Brabant montrent que les zones urbanisées en lisière de la forêt peuvent aussi constituer un habitat adéquat. Le lucane cerf-volant est une espèce thermophile qui a besoin d’un habitat semi-ouvert et d’un microclimat chaud. La plupart des observations ont lieu sur des pentes exposées au sud.

À Bruxelles et en Brabant, l’espèce est observée le plus souvent à proximité des grands massifs forestiers. D’un point de vue historique, il s’agit souvent de zones anciennement gérées en taillis sous futaie, et donc de bois relativement clairs et ouverts. Le bois souterrain n’était peut-être pas toujours exploité. La conversion en futaies dominées par le hêtre a rendu ces bois denses et sombres durant des décennies. La chaleur n’y arrive plus jusqu’au sol, et le microhabitat des pentes exposées au sud disparaît.

Aux environs cependant, de nombreuses végétations relictuelles ont subsisté le long de chemins creux et sur des talus abrupts, et ont conservé le caractère ouvert de la végétation et un microclimat local plus chaud. L’espèce a pu s’y maintenir, et coloniser des vergers de hautes tiges, jardins et arbres d’avenue dans les environs immédiats.

Carte d'habitat du lucane cerf-volant (sud de Bruxelles)

Image d'une carte montrant les zones où le lucane cerf-volant est présent à Bruxelles
© INBO - Bruxelles Environnement

Ligne rouge : périmètre de présence / Surfaces jaunes : zones d'habitats favorables / Surfaces vertes : observations avec preuves de reproduction / Surfaces bleues : observations sans preuve de reproduction dans un habitat favorable. 


Augmentez la quantité de bois mort

Augmentez la quantité de bois mort, en ciblant en priorité les pentes exposées au sud et les microreliefs (talus). Les larves se nourrissent de bois humide vermoulu, enterré totalement ou au moins à moitié dans le sol, qui doit être attaqué par la pourriture blanche pour que la lignine soit décomposée et que les larves puissent accéder à la cellulose.

  • Favorisez le taillis ou le taillis sous-futaie (bois clair, souches avec beaucoup de bois mort).
  • Envisagez la taille en têtard (pour le chêne).
  • Phasez les travaux : tous les travaux de coupe doivent se faire en rotation pluriannuelle, jamais plus de 50m linéaires à la fois.
  • Coupez les arbres de préférence en automne, car en hiver, la teneur en acides tanniques trop élevée des racines ne permet pas l’attaque par les champignons.
  • Empilez une partie du bois coupé contre les souches.
  • Conservez les arbres dépérissants. Ces arbres ont souvent déjà des racines mortes, et fournissent ainsi du bois mort pendant longtemps.
  • S’ils présentent des problèmes pour la sécurité, coupez les arbres morts ou malades à une certaine hauteur, plutôt qu’au niveau du sol (c’est préférable, plus durable, plus visible, et utile aussi pour d’autres espèces).
  • Ne fraisez pas les souches !
Une larve de lucane dévore du bois pourri
© Maria Fremlin, Wikimedia Commons

Des lucanes s'accouplent sur une coulée de sève, sur le tronc d'un chêne.
© Mark Zekhuis, Saxifraga

Gérez les arbres à sève et arbres de rencontres

Les adultes peuvent se nourrir de diverses substances sucrées, avec une nette préférence pour les épanchements de sève des blessures de vieux arbres, mais ils apprécient beaucoup aussi le jus de cerises éclatées ou d’autres fruits. Se nourrir ne leur est cependant pas indispensable.

  • Réalisez l'inventaire des arbres à sève et arbres de rencontre connus, et conservez-les. 
  • Aménagez des sites de ponte aux environs de ces arbres.
  • Laissez des arbres en chandelles, elles ont l’avantage supplémentaire de présenter souvent des écoulements de sève au niveau des gourmands.
  • Appliquez une gestion en taillis des robiniers : ils conviennent bien comme arbres de ponte. Ils laissent passer beaucoup de lumière, leur bois est dur et donc longtemps disponible, et lorsqu’on coupe les rejets des arbres et des souches, l’arbre même meurt souvent, mais les racines continuent à s’étendre. 
  • Donnez la préférence au reboisement spontané, ou planter des essences héliophiles (à défaut, après quelques années). Lors d’éclaircies, supprimez de préférence des essences sciaphiles.
  • Blesser des arbres pour obtenir un épanchement de sève n’est pas une solution, car les écoulements ainsi obtenus ne durent que 2 à 3 jours.

En gestion forestière

  • Créez des zones plus claires riches en bois mort dans les peuplements trop fermés, par annélation d’arbres, coupe à une certaine hauteur, conservation de « chandelles », ou par création de lisières (internes) étagées.

Pratiquez une gestion forestière de conservation intégrale, sans intervention : c’est aussi un moyen d’obtenir à terme une forêt à structure bien diversifiée avec beaucoup de bois mort et de clairières, mais il faut parfois longtemps pour y parvenir.

© Al Vrezec, Saxifraga

Obligations, interdictions... que dit la loi ?

Il est interdit de :

  • Tuer les lucanes cerfs-volants, les capturer, déplacer ou porter atteinte à leur habitat naturel.

Il est obligatoire de :

  • Obtenir une dérogation “nature” pour les travaux dans les zones de nidification du lucane cerf-volant, notamment toute atteinte à du bois mort ou pourrissant (vieux piquets, souches, etc.).

Espèce objectif Natura 2000

Des objectifs de conservation quantitatifs et qualitatifs sont fixés pour chaque espèce d'intérêt régional ou communautaire présente dans les sites Natura 2000 de la Région bruxelloise.

ZSC I Forêt de Soignes et Vallée de la Woluwe

Objectifs quantitatifs

  • Au minimum, maintien des populations existantes.
  • Si possible, extension de ces populations et développement de celles-ci dans au moins 3 sites de reproduction.

Objectifs qualitatifs

  • Améliroation qualitative de l'habitat de l'espèce.
  • Mise en oeuvre d'un réseau d'habitats naturels et artificiels (totems) favorables pour l'espèce s'étendant à partir des endroits où l'espèce est présente.
  • Cf. objectifs de conservation relatifs aux habitats 9120, 9130, 9160, 9190 et 6430.